Chaque jour en Italie, 5,7 millions de personnes prennent le train pour se déplacer. (1) Mais l'apartheid envers les personnes en situation de handicap règne encore. Les personnes handicapées, dans ce beau pays, ne peuvent pas prendre les trains ni accéder aux gares. Voici les chiffres de la honte.
Le transport ferroviaire en Italie est structuré de cette manière :
- services ferroviaires régionaux, 2,9 millions d'utilisateurs quotidiens (données 2018). Parmi eux, 1,5 million dépendent de 20 concessionnaires locaux (802 mille à Trenord en Lombardie, 190 mille à CTI en Émilie-Romagne, 190 mille à Atac dans le Latium, 142 mille à Eav en Campanie) et 1,4 million à des convois de Trenitalia,
- métros, 2,8 millions de passagers chaque jour. Les 7 villes italiennes dotées de lignes de métro (Milan, Turin, Gênes, Rome, Naples, Brescia et Catane) desservent un peu plus de la moitié des voyageurs du métro londonien. Mais les passagers augmentent, 65 mille de plus chaque jour en 2018 par rapport à 2017 et la modeste couverture est passée de 176 à 247 km, entre 2010 et 2019, (2)
- trains interrégionaux. Le TGV italien est utilisé chaque jour par 170 mille usagers (+ 118, 2010-2018). En 2019, 376 trains à grande vitesse circulaient chaque jour (200 Frecciarossa, 90 Italo, 60 Frecciargento, 26 Frecciabianca). Les trains interurbains, en revanche, sont en déclin, avec seulement 50 mille voyageurs (- 46 %, entre 2010 et 2018).
- tramway. Des rails urbains sécurisés sont présents dans 14 villes italiennes.
Et là où les transports en commun urbains fonctionnent, on peut réduire l'utilisation de la voiture, qui couvre encore 60 % des déplacements et est un facteur primordial de pollution atmosphérique, qui est la cause de la plus grave épidémie à l'échelle planétaire.
Frecciarossa (le train à grande vitesse le plus populaire de Trenitalia) peut avoir 1000 (ou 500) sièges. Parmi ceux-là, seuls 2 sont équipés pour les handicapés, 2 sont réservés aux handicapés, 2 autres sont réservés à leurs accompagnateurs. C'est-à-dire que 5,2 % de la population italienne, telle est l'incidence du handicap en Italie, peut accéder à 0,4 % (ou 0,8 %) de l'ensemble des places. (3) L'intercité, avec 2 places réservées (mais non équipées) en plus, atteint 1,2 % au global. Les trains régionaux, au mieux, disposent de deux places équipées et plusieurs réservées au moyen d'un autocollant avec un symbole. Les trains régionaux plus anciens, notamment dans le Sud, où l'âge moyen des trains dépasse 19 ans, ne sont même pas équipés.
La honte est visible, seulement en partie, dans les chiffres suivants :
- 2 places dans chaque train (soit 0,2 à 0,4 % du nombre total de sièges sur Frecciarossa) peuvent être réservées et utilisées par les usagers en fauteuils roulants, qui sont tenus de n'utiliser que les lieux équipés,
- 17 % des gares ferroviaires (320 sur 2050) sont accessibles aux personnes en situation de handicap et équipées pour leur assistance. (4)
La vraie honte ressort entre les lignes du paragraphe « Avertissements », sur la page « Infoaccessibilité », sur le site internet de RFI (Réseau Ferroviaire Italien). (4)
« Il faut garder à l'esprit que pour les passagers en fauteuil roulant, ou en tout cas incapables d'utiliser les escaliers, l'accès autonome aux trains à travers les quais de la gare suppose que ceux-ci peuvent être atteints par un chemin sans obstacle (au sol ou avec un ascenseur ou une rampe) et sans inégalité entre la hauteur du quai et le plancher du train le chariot. »
Les normes européennes d'interopérabilité ferroviaire (2007) ne s'appliquent, selon RFI, que « pour les nouveaux trains et les nouvelles gares ». Elles seraient « en application progressive également sur les infrastructures déjà existantes soumises à des interventions de rénovation ». Mais quelle génération verra le dépassement de la discrimination des personnes en situation de handicap, quand les travaux seront-ils terminés sur 83 % des gares non accessibles ?
Les plus de 65 ans, et les plus de 80 ans, dont la prévalence en Italie (22,6 % et 7 %, respectivement) occupe la première place dans la population de l'UE (Eurostat, données 2018) ne s'émanciperont certainement pas de cette discrimination. Ils ne peuvent pas non plus bénéficier de services de transports publics alternatifs. (5)
Les seniors et les personnes ayant des difficultés (ou une incapacité) à marcher, en pratique, « avant de partir » doivent « acquérir des informations sur :
- la hauteur du plancher d'encastrement du train sélectionné, en contactant l'entreprise ferroviaire,
- la voie programmée, en consultant le service d'horaires en ligne, où il est également possible de vérifier si le train sélectionné est équipé d'une voiture équipée pour le transport de voyageurs en fauteuil roulant,
- les éventuelles pannes temporaires des ascenseurs qui pourraient entraîner des variations dans le degré d'accessibilité de la gare. » À cet égard, il convient de noter que les informations sur l'indisponibilité des ascenseurs et des rampes sont communiquées en ligne seulement si la panne dure plus de XNUMX jours (!).
Les usagers incapables de marcher, en pratique, ont tout de même accès à un nombre limité de trains, même dans les gares adaptées. L'exemple parfait est la ligne Rome-Civitavecchia, où les trains circulent toutes les demi-heures, mais les champions de la patience ne peuvent bénéficier que de 1 train sur 3, avec une attente de 90 au lieu de 30 minutes.
Par ailleurs, le métro n'est pas équipé d'ascenseurs dans de nombreuses stations soi-disant « accessibles », (souvent en panne, à Rome comme ailleurs). Les monte-escaliers ne sont pas en mesure de transporter des fauteuils roulants électriques, en raison de capacité limitée liée au poids et/ou à la taille.
Enfin, en raison du désalignement systématique entre le quai et le marchepied du train, la personne en situation de handicap doit réserver le service d'assistance au moins 48 heures à l'avance. Sinon, elle ne pourra se fier qu'à l'extraordinaire courtoisie du personnel de la Sala Blue, qui fait toujours tout son possible pour compenser les lacunes structurelles.
« Les entreprises ferroviaires et les gestionnaires des gares assurent, par le respect des STI pour les personnes à mobilité réduite, l'accessibilité des gares, des quais, du matériel roulant et des autres services pour les personnes handicapées ou à mobilité réduite » (règlement CE 1371/07, article 21, Accessibilité).
« En cas d'adaptation non conforme, les STI envisagées pour protéger l'accessibilité des gares, des quais, du matériel roulant et d'autres services pour les personnes à mobilité réduite (conformément à l'article 21, paragraphe 1, du règlement CE 1371/07) doivent également être évaluées par rapport au plan pluriannuel des interventions pour l'accessibilité des gares et la couverture économico-financière relative, à définir dans le cadre du contrat programme stipulé avec l'Etat, les entreprises ferroviaires et les gestionnaires de gares sont passibles du paiement d'une amende de 2 000 euros à 10 000 euros, pour chaque cas individuel ». (6)
«Les chefs de service et de gare, dans la mesure de leurs compétences respectives, en garantissent la pleine accessibilité et l'exploitabilité dans le respect des dispositions réglementaires et des chartes de services (…).
Si la reprise de la disponibilité des infrastructures ou des équipements de gare n'intervient pas dans les délais établis et indiqués (...), l'usager en situation de handicap ou à mobilité réduite a droit à une indemnisation, définie par les gestionnaires de service et de gare, dans la mesure de leurs compétences respectives, dans leurs propres cartes de service.
En cas d'un trajet indiqué sur l'horaire publié comme utilisable par les usagers en situation de handicap ou à mobilité réduite est rendu avec du matériel inadapté ou remplacé par un service de voiture de remplacement ou complémentaire non accessible ou inadapté, l'usager handicapé ou à mobilité réduite, ayant déjà acheté un titre de transport qui peut être utilisé pour le trajet concerné, a droit, en plus du remboursement du billet, à une indemnisation. » (7,8).
La Convention des Nations Unies sur les droits des personnes handicapées (CNUDPH) est entrée en vigueur le 3/5/2008 (9), soit un an après l'adoption du règlement CE 1371/07 portant dispositions générales sur les transports ferroviaires dans l'Union européenne. Ce règlement, ainsi que les règles qui en découlent, auxquelles il est fait référence dans les paragraphes précédents, n'est pas compatible, si on le regarde en détail, avec les droits des personnes handicapées, tels qu'énoncés dans la Convention CDPH.
« Les États parties à la présente Convention reconnaissent le droit égal de toutes les personnes en situation de handicap de vivre dans la société, avec des choix égaux à ceux des autres, et de prendre des mesures efficaces et appropriées pour faciliter la pleine jouissance par les personnes handicapées de ce droit et leur pleine inclusion et participation à la communauté, notamment en veillant à ce que : (...)
(c) les services communautaires et les installations pour la population générale soient disponibles sur un pied d'égalité avec les personnes handicapées et répondent à leurs besoins. » (9)
Les personnes en situation de handicap et à mobilité réduite ont pleinement le droit d'accéder aux services de transport public sur un pied d'égalité avec la population en général. Ce droit est un corollaire du droit constitutionnel à l'égalité et à l'égale dignité sociale, qui correspond à la tâche de l'État de supprimer les obstacles susceptibles de provoquer des discriminations liées, entre autres, aux conditions personnelles des individus.
Le législateur européen doit mettre à jour le règlement CE 1371/07 pour assurer la pleine mise en œuvre des droits affirmés par la Convention CRPD des Nations Unies, surtout en ce qui concerne le transport ferroviaire. En attendant, le gouvernement italien, les régions et les provinces autonomes doivent garantir l'application cohérente des règles en vigueur. De notre côté, en attendant, nous signalerons aux autorités compétentes tout épisode de discrimination au détriment des seules personnes physiquement plus faibles.
Stop à l'apartheid, #Égalité !
Dario Dongo
(1) Rapport Legambiente, Pendulaire 2019
(2) Métros et tramways en Europe et dans les environs, en un coup d'œil http://www.urbanrail.net/eu/euromet.htm
(3) Rapport ISTAT Connaître le handicap 3/12/19
(4) https://www.rfi.it/it/stazioni/pagine-stazioni/accessibilita/infoaccessibilita.html
(XNUMX) Malgré que la loi n°XNUMX du XNUMX/XNUMX/XNUMX est en vigueur depuis XNUMX ans (loi-cadre pour l'assistance, l'intégration sociale et les droits des personnes handicapées), elle prévoit que « les régions réglementent les modalités d'intervention des communes pour permettre aux personnes handicapées de se déplacer librement sur le territoire en utilisant, dans les mêmes conditions que les autres citoyens, des services de transports collectifs adaptés ou des services alternatifs. » (article XNUMX, Mobilité et transports collectifs)
(6) Décret législatif 70/14, discipline de sanction pour la violation des dispositions du règlement (CE) n°1371/2007, relatif aux droits et obligations des passagers dans le transport ferroviaire. Article 16, Sanctions en cas de non-respect des obligations de protection du droit au transport des personnes handicapées ou à mobilité réduite
(7) Résolution de l'Autorité de Régulation des Transports n°106/2018. Annexe, Mesure 5, Droit à l'accessibilité et à la convivialité des services et des gares
(8) Mesure 5 visée à la note précédente 8, point 4. 4. «Les indemnités (...) sont déterminées en tenant compte, le cas échéant, des critères suivants :
a) la durée d'indisponibilité de l'infrastructure ou de l'équipement ;
b) la distance à parcourir pour atteindre la première station, dont l'accessibilité est garantie,
fonctionnel au voyage prévu ;
c) la possibilité pour l'usager de bénéficier d'un transport alternatif accessible et économiquement équivalent»
(9) CDPH, article 19 (Vivre de façon autonome et être inclus dans la communauté). Le texte intégral de la convention et de son protocole facultatif additionnel, tous deux ratifiés par l'UE et ses États membres, le
https://www.un.org/disabilities/documents/convention/convention_accessible_pdf.pdf
Dario Dongo, avocat et journaliste, Docteur en droit alimentaire international, fondateur de WIISE (FARE - GIFT - Food Times) et d'Égalité.